Une transmission réussie, l’émouvant passage de flrambeau d’André Chevalley aux dirigeants actuels du Groupe Chevalley

3 août 2025

Une transmission réussie, l’émouvant passage de flrambeau d’André Chevalley aux dirigeants actuels du Groupe Chevalley

Photo Chevalley – Berney ©

Par Thierry Dime

Transmettre une entreprise, c’est bien plus que vendre un actif : c’est confier un héritage, des valeurs, et parfois même une partie de sa vie. C’est cette aventure humaine qu’a vécue André Chevalley, fondateur de la PME locale de renom, en cédant en partie son entreprise à son management actuel, Jean-Baptiste Colin (CEO) et Damien Debureau (COO). Une transition menée avec succès par Berney Associés, qui illustre parfaitement comment une transmission interne peut concilier performance économique et préservation de l’âme d’un groupe employant plus de 300 collaborateurs en Suisse romande.

La genèse d’une transmission inattendue

Créé il y a plusieurs décennies par André Chevalley, le groupe qui porte son nom s’est imposé comme un acteur incontournable sur les marchés genevois et vaudois de l’automobile. Distributeur officiel de marques prestigieuses telles que Mercedes et Bentley depuis de nombreuses années, le groupe Chevalley a su également se diversifier et répondre aux attentes de ses fidèles clients en distribuant également les marques Hyundai, Mazda, Nissan et Volvo. En effet, l’entreprise s’est forgée une solide réputation en combinant excellence du service, innovation et proximité client. Mais comme dans de nombreuses entreprises familiales, l’heure de la retraite du fondateur s’est accompagnée d’une question cruciale : qui pour reprendre le flambeau ? « Ma fille, Aurélie, a très rapidement exprimé son souhait de ne pas reprendre la direction de l’entreprise. Il fallait donc trouver une autre voie, cohérente avec les valeurs du groupe et sa trajectoire », confie André Chevalley.

Dans un premier temps, la solution naturelle envisagée par André Chevalley fut celle d’une cession à un groupe externe. Entouré de sa direction opérationnelle et accompagné par Berney Associés, il engage un processus structuré et discret de vente, en ciblant plusieurs repreneurs potentiels, principalement des groupes français actifs dans le secteur de la distribution automobile. La démarche est sérieuse : documentation détaillée, due diligence, négociations avancées… tout est mis en œuvre pour concrétiser une transmission à un acteur solide et expérimenté. Pourtant, au fil des discussions, une série de doutes apparaissent. Les échanges révèlent un décalage culturel, une vision parfois trop éloignée de la réalité locale et, surtout, une inquiétude grandissante quant à l’avenir de l’entreprise et de ses collaborateurs dans un groupe qui pourrait, à terme, restructurer, absorber ou dénaturer ce qui fait l’essence même du Groupe Chevalley. C’est précisément ce constat qui amène les parties prenantes à remettre en question la direction initiale. « Le principal frein était d’ordre culturel et humain : vendre à un groupe étranger signifiait probablement diluer l’ADN d’une PME locale profondément ancrée dans son territoire », explique Raphaël Leveau de Berney Associés. Le risque n’est pas simplement économique, il est identitaire. Le Groupe Chevalley ne se résume pas à une suite de chiffres ou à un portefeuille de marques : il incarne une culture, une proximité avec ses clients, un lien fort avec ses collaborateurs. Face à ce constat, une évidence finit par émerger, presque naturellement : et si la meilleure relève se trouvait déjà dans l’entreprise ?

Berney Associés : structurer l’impensable

La transmission interne n’était pourtant pas gagnée d’avance. Raphaël Leveau, en charge du dossier, se souvient : « Le plus gros frein était psychologique. Vendre à l’externe, c’était risquer de perdre l’ADN de l’entreprise. » Le cabinet a d’abord accompagné les négociations avec des repreneurs potentiels avant de pivoter vers une solution inédite : un management buy-out (MBO). Un montage financier audacieux, combinant prêt bancaire (LBO) et apport des repreneurs, rendu possible par la solidité de l’entreprise et la confiance des banques envers les deux dirigeants. « Les banques ont regardé notre capacité à générer du cash-flow, mais aussi notre légitimité à reprendre le groupe », explique Damien. Un pari réussi, grâce à leur connaissance de l’entreprise et au soutien indéfectible d’André Chevalley, resté co-actionnaire pour assurer une transition douce au niveau actionnarial.

Jean-Baptiste Colin et Damien Debureau : une relève de cœur et de raison

Directeurs opérationnels en charge de la gestion du groupe depuis de nombreuses années, Jean-Baptiste Colin et Damien Debureau connaissent l’entreprise comme leur poche. Mieux encore, ils l’incarnent déjà au quotidien. Ce sont eux qui formulent la proposition décisive : reprendre l’entreprise par un management buy-out (MBO). « Dès qu’André Chevalley a évoqué une potentielle vente, je me suis dit : je ne veux pas voir ce groupe partir dans d’autres mains. Avec Damien, on a tout de suite su qu’on devait proposer une alternative qui nous semblait plus pertinente », explique Jean-Baptiste Colin. Le défi est immense : il faut convaincre le fondateur et surtout trouver les financements nécessaires pour une opération financière de taille. « Nous avons misé sur notre connaissance du marché et du groupe, sur les résultats solides de ces dernières années ,sur la confiance des partenaires bancaires et des marques que nous représentons. Ce n’était pas gagné d’avance, mais la résilience a payé », complète Damien Debureau.

Structurée avec l’appui de Berney Associés, la reprise s’est articulée autour d’un financement mixte, combinant prêt bancaire (LBO), crédit vendeur et maintien partiel du fondateur au capital. Une formule à la fois pragmatique et rassurante. « Ce type de transaction est très sain, car ceux qui reprennent sont déjà aux commandes. Il n’y a pas d’effet de rupture. C’est un modèle qui devrait inspirer bien d’autres entreprises », souligne Raphaël Leveau. « On a dû prouver que notre business plan n’était pas un rêve, mais une réalité », souligne Jean-Baptiste. Leur réussite en 2023 (2e groupe suisse chez Mercedes) et 2024 (1er des grands groupes suisses) a fini de lever les doutes.

La leçon : résilience et alignement des planètes

Cette aventure entrepreneuriale illustre parfaitement les ressorts d’une transmission réussie. Face aux obstacles et aux incertitudes, les deux repreneurs ont fait preuve d’une résilience remarquable, ne renonçant jamais à leur projet malgré les revers initiaux. Leur légitimité opérationnelle et leur complicité, acquise au fil des années au sein de l’entreprise, a joué un rôle déterminant pour convaincre les partenaires financiers et rassurer les parties prenantes. Ce socle de crédibilité, couplé à une vision claire et partagée, leur a permis de franchir chaque étape avec détermination. Mais au-delà de la persévérance, cette réussite tient aussi à un alignement de facteurs favorables : le soutien du cédant, la continuité assurée avec les fournisseurs et la confiance accordée par les banques ont été autant d’éléments clés qu’ils ont su saisir au bon moment.

Aujourd’hui, le Groupe Chevalley connaît une dynamique florissante : les résultats sont au rendez-vous, la dette se rembourse de manière plus rapide qu’anticipé, et surtout, l’équipe de 330 collaborateurs a été préservée. « On a gardé notre culture, et ça, c’est notre plus grande fierté », confie Damien, l’un des repreneurs, soulignant que la réussite d’un MBO ne se mesure pas uniquement en chiffres, mais aussi en valeurs humaines conservées.

Quand la transmission préserve l’âme d’une entreprise

L’histoire d’André Chevalley, Jean-Baptiste Colin et Damien Debureau est bien plus qu’une success-story financière. C’est un hommage à la loyauté, à l’audace et à la passion entrepreneuriale. Elle rappelle qu’une transmission réussie ne se mesure pas seulement en franc, mais en vies préservées, en emplois sauvegardés, et en valeurs perpétuées. Aux dirigeants qui hésitent sur l’avenir de leur entreprise, Raphaël Leveau livre ce conseil : « La solution n’est pas nécessairement toujours une vente à l’externe. Parfois, les meilleurs repreneurs sont déjà dans vos rangs. » Une belle leçon d’humilité et de vision à méditer.

Comment éviter les erreurs coûteuses ?

Dans un processus de transmission par Management Buy-Out (MBO), ou rachat d’entreprise par ses collaborateurs, les erreurs coûteuses surviennent souvent par manque d’anticipation ou de préparation stratégique. Pour les éviter, il est essentiel de planifier suffisamment en amont – idéalement cinq à dix ans avant la transmission. Cette anticipation permet d’optimiser les aspects fiscaux, patrimoniaux et financiers, notamment à travers une structuration intelligente des revenus (dividendes, rachats de prévoyance, mécanismes liés au prix de vente, etc.). Une évaluation régulière de l’entreprise, une mise en conformité juridique et fiscale, et une préparation progressive des repreneurs sont également des étapes clés pour sécuriser l’opération.

Les écueils les plus fréquents

Le Management Buy-Out (MBO), ou rachat d’entreprise par ses collaborateurs, présente plusieurs écueils récurrents qui peuvent fragiliser la réussite de l’opération. L’un des premiers défis réside dans le prix de vente parfois inférieur à celui d’un acquéreur externe, en raison d’une « décote » concédée par loyauté envers les employés. S’ajoutent à cela quelques défis concernant le financement, les collaborateurs ne disposant généralement pas de capitaux suffisants. Le prêt vendeur peut partiellement combler cette lacune, mais il peut créer une interdépendance prolongée entre cédant et repreneur, source potentielle de tensions. Par ailleurs, la proximité personnelle entre les parties, bien que parfois bénéfique, peut entraver les négociations en introduisant une charge émotionnelle excessive. Il est donc fortement recommandé de faire appel à des conseillers externes afin d’assurer un cadre neutre et professionnel.

L’indispensable : un expert indépendant

Dans le cadre d’un Management Buy-Out (MBO), la présence d’un expert indépendant est essentielle pour sécuriser chaque étape du processus de transmission. Un spécialiste expérimenté peut jouer le rôle de tiers neutre, facilitant la communication entre le cédant et les repreneurs, en particulier lorsque des relations personnelles ou hiérarchiques préexistantes peuvent altérer la transparence des discussions. Il aide à structurer l’opération, évaluer l’entreprise de manière objective, négocier les conditions de reprise, et mettre en place et négocier les solutions de financement sur-mesure les plus adaptées, notamment dans des contextes où les ressources propres des repreneurs sont limitées. Grâce à cette vision à 360 degrés, l’expert en transmission garantit que l’opération ne se limite pas à un simple changement d’actionnariat, mais qu’elle s’inscrit dans une logique de continuité, de performance durable et de création de valeur pour l’ensemble des parties prenantes.

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