La LPP, grande oubliée des entretiens d’embauche ?

1 décembre 2025

La LPP, grande oubliée des entretiens d’embauche ?

Par Ivan Rego

Il m’a longtemps fallu réfléchir à la manière de débuter cet article. Fallait-il frapper fort avec une accroche provocatrice ? Les options ne manquaient pas : « Si personne ne vous parle de la LPP en entretien, vous perdez de l’argent », « La LPP, ce que l’on ne vous révèle jamais avant de signer », ou encore « LPP : un pilier essentiel trop souvent ignoré par candidats et employeurs
Mais l’objectif n’est pas de pointer du doigt ou de blâmer les acteurs du recrutement. Il s’agit plutôt de rappeler le rôle fondamental de la prévoyance professionnelle et de la remettre à la place qu’elle mérite : au cœur de la rémunération globale.

Aujourd’hui encore, force est de constater que la prévoyance professionnelle est très rarement abordée durant les processus de recrutement. Les candidats, souvent concentrés sur la présentation de leur parcours, de leurs compétences et de leurs motivations, n’ont que rarement le réflexe, ou peut-être pas l’intérêt, de poser des questions sur le plan de prévoyance ou sur la caisse de pension de l’entreprise.
De leur côté, les employeurs mettent généralement l’accent sur les éléments les plus visibles du package : salaire, bonus, télétravail, avantages en nature (abonnement de transport, voiture de fonction, etc.).

Est-ce une omission volontaire ? Un employeur dont le plan se limite au minimum légal n’a pas nécessairement intérêt à mettre ce point en avant.
Ou est-ce simplement que, dans la réalité actuelle du marché, la prévoyance professionnelle n’est pas perçue comme suffisamment prioritaire pour être évoquée avant la signature du contrat ?

Or, l’impact d’un plan de prévoyance comparé à un autre peut être considérable pour la retraite d’un assuré.

Petit rappel utile : la loi sur la prévoyance professionnelle fixe uniquement les minimums légaux que chaque plan doit respecter. En 2025, le salaire assuré/coordonné LPP maximal s’élève à CHF 64’260.-.

Qu’est-ce que cela implique ? Que si votre employeur a souscrit un plan minimal LPP, vos cotisations et potentielles futures prestations seront calculées sur ce montant, indépendamment de votre salaire brut réel.

Pour illustrer cela, prenons l’exemple d’une personne de 46 ans avec un salaire annuel de CHF 85’000.- :

  • Avec un plan minimum, l’épargne annuelle LPP s’élève à CHF 8781.-
  • Avec un plan amélioré (pas de déduction de coordination et un taux épargne à 18% au lieu de 15%, l’épargne annuelle atteindrait CHF 15’300.-

Soit une différence de CHF 6519.-, directement crédités dans votre avoir LPP.

Chaque année. Net. Sans impôt direct.

On imagine dès lors aisément l’impact que cela peut représenter sur plusieurs années, et plus encore pour un salaire plus élevé.

L’idée n’est évidemment pas de blâmer les employeurs proposant un plan minimal. Il faut garder à l’esprit que tout ceci représente un coût significatif pour les entreprises ; au minimum, la moitié des cotisations est à la charge de l’employeur. Pour certaines structures, augmenter ces coûts pourrait fragiliser ces dernières, voire freiner leur capacité à recruter.

Par ailleurs, certains employeurs choisissent d’investir dans d’autres composantes de la rémunération globale, comme des salaires plus élevés ou d’autres avantages.

Au-delà du choix du plan, il est également essentiel de s’intéresser à la caisse de pension elle-même. L’employeur dispose – sauf cas particulier tels que les entreprises publiques ou certaines CCT – d’une liberté presque totale pour sélectionner l’institut de prévoyance à laquelle il souhaite affilier ses collaborateurs. Pour donner un ordre d’idées, on recensait 1237 caisses de pension en 2024, selon CHS PP.

Les caisses se distinguent notamment par leurs performances financières et par l’intérêt qu’elles versent chaque année aux assurés. Comme vous le savez, elles investissent les avoirs de vieillesse sur les marchés financiers. Une partie de ces rendements générés est ensuite redistribuée aux assurés.

En 2025, le taux d’intérêt minimum LPP s’élève à 1.25% et ne s’applique que sur la partie obligatoire (dispositions minimum LPP). Or, certaines caisses ne se limitent pas à ce pourcentage. En effet, quand nous comparons les caisses et les intérêts versés, nous pouvons remarquer que l’intérêt distribué peut s’élever jusqu’à 8% («verzinsung 2025», Pensionskassenvergleich.ch).

Illustrons cela avec un avoir LPP de CHF 200’000.- :

  • Avec le taux minimum, l’intérêt crédité s’élève à CHF 2500.-
  • Avec un taux de 4%, le montant crédité s’élève à CHF 8000.-

Bien entendu, il convient de vérifier si le taux est englobant ou s’applique uniquement à la partie obligatoire. Néanmoins, l’exemple permet de saisir l’ampleur des différences.

La question du taux de conversion mériterait également sa place dans cet article. En effet, il influence directement le montant de la rente perçue et, par conséquent, la planification financière future. Néanmoins, cet aspect est souvent moins déterminant dans le cadre d’un entretien d’embauche, sauf lorsqu’il s’agit du recrutement d’un collaborateur senior se rapprochant de l’âge de la retraite.  

Alors, candidats : n’hésitez pas à poser les bonnes questions lorsque viendra le moment d’aborder le package global. Selon votre situation personnelle, l’impact peut être bien plus significatif qu’il n’y parait. Ne vous arrêtez surtout pas au « nous avons un bon plan LPP ».

Et employeurs : ne craignez pas de valoriser cet aspect. La qualité de votre prévoyance professionnelle deviendra un élément clé de votre marque employeur, mais également un levier essentiel de rétention des talents. D’autant plus dans un contexte où les perspectives pour nos avoirs de retraite ne sont guère  rassurantes…

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