Le 6 mai dernier, la Suisse s’est engagée auprès des membres de l’OCDE à pratiquer l’échange automatique de renseignements. Le nouveau système qui devrait entrer en vigueur en 2017 mettra fin au secret bancaire actuel. Cette disparition fait craindre à certains l’effondrement du système économique en place et la fin de la prospérité en Suisse. L’annonce retentissante faite à Paris résonne encore dans la tête de nombreux suisses. Le secret bancaire en place depuis 1934 dans la loi fédérale sur les banques et les caisses d’épargne à l’article 47 pourrait bientôt disparaître. En cause, l’évasion fiscale facilitée par le secret bancaire qui fait perdre chaque année des milliards aux finances publiques des Etats tiers.
Le secret bancaire est un secret professionnel, semblable à celui des médecins. Il consiste à protéger les clients des banques de l’intrusion d’un tiers dans leurs données privées, que ce soit l’Etat ou un organe étranger. Le banquier ne peut ainsi divulguer aucune information concernant sa clientèle. Cette pratique, qui existe dans plusieurs pays, a permis à la Suisse de gagner en prestige dans le secteur économique mondial et l’a menée au statut de véritable place financière de première importance.
Cependant le secret bancaire qui se voulait au départ vertueux a permis le blanchiment d’argent ou encore l’évasion fiscale. La trop belle réputation de la Suisse lui a alors joué des tours et le petit pays s’est vu de plus en plus pointé du doigt par les géants comme les Etats-Unis et l’Europe. La Suisse est ainsi devenue la mauvaise élève. La pression est devenue si grande qu’elle a finalement mené à la signature de cet accord avec l’OCDE obligeant l’échange d’information automatique.
Concrètement, cela signifie que dans le futur les banques helvètes devront transmettre les informations sur les relevés de comptes, les produits financiers, les revenus d’intérêts, les dividendes ou encore les ventes.
Cet accord suscite évidemment de grandes inquiétudes au niveau international d’abord, car la Suisse risque de perdre en compétitivité. On peut en effet imaginer que sans le secret bancaire, les étrangers fortunés ne voient plus d’intérêt à placer leur argent en Suisse. Ces mêmes personnes qui ont déjà des comptes pourraient les fermer et se tourner vers de nouveaux paradis fiscaux plus attrayants.
Au niveau national, ensuite, car le secteur bancaire joue un rôle important non seulement pour l’économie du pays mais aussi pour l’emploi. Il représente en effet 12% du PIB suisse et regroupe selon l’OFS quelques 128’000 employés en 2012. Ceci pourrait déstabiliser un peu plus le secteur bancaire et ainsi engendrer des vagues de licenciements.
Les plus alarmistes disent enfin qu’avec la disparition de comptes en banque domiciliés en Suisse la Confédération va connaître un déclin économique certain.
Mais si la Suisse risque de perdre en attractivité et de devoir supprimer des emplois n’oublions pas qu’elle dispose de beaucoup d’atouts pour se démarquer des autres nations. Par exemple dans les domaines de la santé, de la formation, de la haute technologie, de la chimie ou encore de la pharmaceutique. Ces atouts constituent un label de qualité.
On connaît la fâcheuse tendance des économistes à inquiéter le peuple suisse quand il s’agit de modifier un pan du fonctionnement actuel. Certains discours concernant la fin du secret bancaire en Suisse donnent l’impression que toute l’économie et la viabilité du pays reposent sur ce seul pilier.
Néanmoins, la Suisse a su construire une image économique forte grâce à un large panel d’arguments. Il s’agit tout d’abord de son savoir-faire, notamment en matière de gestion de fortune, mais aussi de la stabilité de son système politique et juridique de même que pour son franc suisse. Les compétences de son personnel bancaire et fiscal ont, quant à elles su créer un climat favorable à la croissance du pays. Tout ceci en fait une des économies les plus prospères au monde.
Même si la santé économique pourrait prendre un coup suite à cette décision, ceci ne l’anéantira certainement pas. Rappelons par ailleurs que l’emploi dans le secteur bancaire représente 3.3% des emplois en Suisse et que la majorité des postes de travail se situent dans les PME.
On s’affole tellement autour de la fin du secret bancaire, qu’on en oublie que la Suisse reste une plaque tournante à l’échelle globale grâce à l’implantation de sièges internationaux d’entreprises de grandes renommées et d’institutions internationales comme l’ONU ou le CICR. N’oublions pas non plus son secteur horloger constituant une ressource immense d’exportation au niveau mondial.
Finalement, on ne peut réduire la Suisse à son seul secret bancaire. Les Helvètes sont ingénieux et regorgent de ressources pour faire avancer leur pays, ils ne doivent en aucun cas craindre l’écroulement de leur pays et la fin de leur histoire.
Alix Dettwiler– Rédactrice pour le magazineLe Monde Economique