Par Luc Olivier, gérant chez La Financière de l’Echiquier
1 million de mètres carrés, c’est la superficie du plus grand data center du monde, situé aux Etats-Unis, pays comptant le plus de centres de données au monde. L’Allemagne occupe la deuxième place [1]. Une multitude d’allées de serveurs, reliées à des processus et des disques durs qui fonctionnent en continu, voici le cœur de ces espaces. Or noir du 21esiècle, la donnée est omniprésente et la révolution de l’IA accélère encore le besoin de puissance de calcul. Cette explosion nécessite des infrastructures toujours plus performantes et nombreuses. La demande en data centers devrait ainsi croître de 20% par an d’ici 2030[2]. Gourmands en ressources, leur empreinte environnementale est un enjeu de durabilité crucial, pour les entreprises comme pour les acteurs de la finance durable.
Indispensables à l’essor technologique, les data centers consomment aujourd’hui, selon l’Agence Internationale de l’Energie, plus de 2% de l’électricité mondiale, soit autant que le transport aérien. Nous sommes faces à une équation paradoxale. Alors que l’IA, et plus généralement la production de données, connaissent une ascension aussi fulgurante qu’inéluctable, des data centers toujours plus performants sont indispensables. Cette explosion de la demande est énergivore. Les serveurs sont alimentés par des réseaux électriques très puissants, dont le refroidissement permanent est impératif et consommateur de ressources. Près de 40% de la consommation électrique d’un centre de données sont dédiés au refroidissement des serveurs, selon Alfa Laval, spécialiste de l’échange thermique. Drainer des capitaux et accompagner les entreprises dans la prise en compte de ces enjeux de transition énergétique est donc déterminant.
Plusieurs techniques existent pour améliorer l’efficacité énergétique de ces infrastructures. Alors que le refroidissement par l’air, solution historique, n’est plus assez performant, le liquid cooling, refroidissement liquide, se distingue. Composée majoritairement d’eau, cette solution constitue un enjeu majeur de transition, d’énergie et d’accès à la ressource. Les chiffres sont éloquents. A titre d’exemple, Google a utilisé en 2023 près de 28 milliards de litres d’eau pour refroidir ses data centers[3].
Soutenues par des investisseurs conscients de l’enjeu, des entreprises innovantes se sont saisies de ces sujets, à l’image de Munters, spécialiste du refroidissement des data centers. Le groupe suédois, dont le département data centers représentait 28% du chiffre d’affaires en 2024, a développé une unité de refroidissement liquide à grande échelle. Ce module contrôle avec précision le débit et la température. Le liquide est envoyé vers les structures qui encerclent les serveurs, puis vers un système de refroidissement central, pour être refroidi, ensuite le cycle recommence. Les systèmes de Munters utilisant l’air ambiant comme source de refroidissement, permettent une réduction de la consommation d’eau et d’énergie jusqu’à 70% par rapport à un système traditionnel. Autre exemple avec Siemens qui a également développé une technologie de pointe. Son système Demand Flow optimise efficacement les systèmes de refroidissement avec de l’eau glacée. Grâce à une technologie automatisée et des analyses intégrées, cette innovation est destinée à prolonger la durée de vie des équipements tout en réduisant la consommation énergétique.
Ces solutions innovantes développées par des entreprises pionnières sont indispensables à la transition énergétique. L’adaptation des data centers est décisive. Limiter leur impact environnemental en utilisant des énergies renouvelables et en récupérant l’énergie produite est une première étape : des innovations émergent. L’une d’elles vise à utiliser la chaleur produite au sein de ces infrastructures pour l’injecter dans les réseaux urbains. Au Danemark, la chaleur produite par le centre de données de Facebook couvre ainsi les besoins de plus de 6 000 foyers, et à Londres, un data centers IBM permet de chauffer une piscine universitaire, réduisant ainsi de 10% sa consommation énergétique.
Si les défis sont multiples, soutenir ces avancées technologiques est l’opportunité de conjuguer performance financière et impact environnemental. Pour les investisseurs engagés que nous sommes, il est crucial d’agir aux côtés des entreprises en alliant financement à engagement actionnarial. Nous sommes convaincus de la nécessité d’accompagner tous les acteurs de la transition énergétique. L’enjeu est capital pour préserver nos écosystèmes.
[1] Cloudscene, 2024
[2] Cabinet McKinsey, cité par Novethic 2025
[3] Environnemental Report Google, 2023
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