Le populisme du trop d’impôts tue notre démocratie

10 octobre 2013

Le populisme du trop d’impôts tue notre démocratie

J’ai récemment lu un excellent article dans le Libé, sur les impôts en France (« Trop d’impôts: la grande illusion »), qui me semble excellent et qui va à l’encontre des idées reçues. Je vais essayer ici de résumer les quelques points saillants, ce que je trouve intéressant dans cette période budgétaire, aussi à notre niveau cantonal. La grande question est celle de la comparaison des prélèvements obligatoires. De manière brute, nous ne pouvons comparer les pays ainsi, il faut prendre en considération un certain nombre d’éléments pour que cet exercice ait un sens:

Il faut tout d’abord mettre en perspective les dépenses que ces prélèvements obligatoires financent, en d’autres termes se demander quelle place les services publics occupent dans tel ou tel pays. Ainsi, et je cite l’auteur de l’article, « chaque société décide de consacrer X% de ses ressources à la santé et à la protection sociale ». C’est un choix politique.

Autre élément à analyser, la société aussi décide de financer ces services correspondants de manière publique et organisée, ou pas. Ainsi, les Etats-Unis financent leur système de santé en grande partie par des assurances privées, et ces cotisations plus ou moins volontaires ne rentrent pas dans le taux de prélèvements obligatoires. C’est aussi en grande partie le cas en Suisse, à la différence de la France. Notons qu’au final les Etats-Unis consacrent 17.9% de leur PIB à leur système de santé, qui se relève plutôt médiocre et inégalitaire (selon des études de l’OMS), contre 11.6% en France. On retrouve ce type de différence avec les retraites par capitalisation – comme en Suisse- dont les contributions n’entrent pas dans le taux de prélèvements obligatoires.

Il faut aussi appréhender les taux de prélèvements obligatoires nets des transferts: ces prélèvements sont très souvent directement redistribués aux agents économiques, sous forme de prestations sociales pour les ménages ou de subventions pour les entreprises. Ce taux net (17.9% en France) se retrouve ainsi à un niveau légèrement inférieur à celui des autres pays « développés », contre tous les préjugés sur le trop d’impôt en France!

Par ces quelques éléments d’analyse, j’aimerais souligner combien le populisme du trop d’impôts tue ce qui fait le fondement de notre société et de la démocratie: à trop comparer ce qui n’est pas comparable, on dénature les réalités, pour idéologiquement diminuer le rôle de l’Etat.

Pour Guillaume Allègre, chercheur français dans les questions de conjoncture économique, « ceux qui disaient hier que l’Etat était en faillite ne se réjouissent pas aujourd’hui de la réduction des déficits. Ce qui tend à montrer que leur préoccupation n’était pas la réduction des déficits, mais le démantèlement de l’Etat social ». On sent la charge contre Fillon, Sarkozy et consorts, mais cette citation est à méditer aussi en Suisse pour tous les pourfendeurs de notre Etat et de ses dépenses.

Manuel Donze – Chroniqueur pour le magazine Le Monde EconomiqueManuel Donze – Chroniqueur pour le magazine Le Monde Economique et Fondateur des coffrets cadeaux Ohbox.ch

 

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