Oubliez le débat dovish contre hawkish, place au duel des cigales face aux fourmis

16 février 2021

Oubliez le débat dovish contre hawkish, place au duel des cigales face aux fourmis

Photos © LFDE

ECONOMIE US

Olivier de Berranger, CIO LFDE

Pour les investisseurs qui s’intéressent à la situation économique américaine, le débat tourne traditionnellement autour du match qui oppose les dovish – partisans d’une politique monétaire souple et accommodante – aux hawkish – défenseurs d’un politique monétaire structurellement plus stricte et restrictive. Mais aujourd’hui cet affrontement symbolique semble hors de propos., Comme son directeur Jerome Powell l’a rappelé une nouvelle fois la semaine dernière, la Fed maintiendra une politique monétaire accommodante, tant que l’économie n’est pas proche du plein-emploi. Avec un chômage qu’il estime à 10% aujourd’hui, le retour au plein-emploi – autour de 3 ou 4% de taux de chômage – ne devrait pas intervenir avant plusieurs semestres. Ainsi, un seul membre de la Fed anticipe-t-il, à l’horizon fin 2022, une hausse de taux symbolique de +0,25%, tandis que les 16 autres voient les taux directeurs rester stables dans la fourchette 0 à 0,25%. A l’horizon fin 2023, 12 des 17 gouverneurs prévoient encore des taux stables donc proches de zéro. Le durcissement monétaire n’est pas pour demain, sauf si l’inflation venait à surchauffer brutalement. A moyen terme au moins, ce débat semble être tranché.

Clément Inbona, Fund manager, LFDE

Voilà pourquoi, un nouveau duel par tribunes interposées émerge chez les observateurs de l’économie américaine : les fourmis – partisanes d’une relance budgétaire plus mesurée – contre les cigales – promotrices de dépenses gouvernementales généreuses et rapides. Le débat se reporte non plus sur la politique monétaire mais sur son pendant gouvernemental : la politique budgétaire. L’enjeu du moment est de savoir si les mesures de soutien et de relance ne seraient pas surdimensionnées, au point de provoquer une surchauffe de croissance et d’inflation, génératrices de déséquilibres mal anticipés. Pour rappel, en 2020 la récession américaine ne s’est élevée « qu’à » -3,5%, là où le déficit budgétaire s’est creusé de -15,6%, soit plus de 10 points de plus qu’en 2019. Pour 2021, les chiffres sont encore plus flagrants : la croissance attendue s’élève +4,1% aux Etats-Unis pour un déficit attendu de plus de -10%. Les stimuli budgétaires surpassent de loin les variations du PIB américain en 2020 et 2021. Les stigmates économiques et sociaux de la crise sont profonds économiquement et socialement, cette confrontation fourmis/cigales semble tout sauf anecdotique.

En zone euro ce sujet semble pour le moment hors de propos. Car même si la zone a été plus durement frappée par la récession, de -7,2% en 2020, l’ampleur des plans de relance évoqués jusqu’ici est anecdotique face à l’Oncle Sam : un déficit de -9,5% en 2020 qui se réduirait à -6,2% en 2021. Après avoir été plus durement touchée par la crise, il semble nécessaire que l’Union européenne et les gouvernements actent rapidement de nouvelles mesures de relance afin que la zone ero, plus dureent touchée par la crise, ne soit pas une nouvelle fois à la traîne comme cela avait été le cas après 2008. Les citoyens européens pourraient bientôt réclamer au trio Macron-Merkel-Mario une version revisitée de la fable de la Fontaine La Cigale et la Fourmi en leur demandant : « Eh bien, dépensez maintenant ».

Auteurs : Olivier de Berranger, CIO et Clément Inbona, Fund manager, LFDE

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