OUT OF AFRICA – MAIS PAS POUR LONGTEMPS ENCORE : DES ŒUVRES D’ART BIENTÔT RESTITUEES A L’AFRIQUE

8 janvier 2019

OUT OF AFRICA – MAIS PAS POUR LONGTEMPS ENCORE : DES ŒUVRES D’ART BIENTÔT RESTITUEES A L’AFRIQUE

Qu’elles aient été l’objet d’un pillage colonial sauvage ou d’une mainmise savante et éclairée, elles se préparent toutes aujourd’hui au retour dans leurs pays d’origine. Qu’elles aient été volées par des militaires, des colons profiteurs, des spoliateurs ou aient été dérobées d’une manière plus « élégante » et ramenées en Europe par des connaisseurs, des archéologues et des intellectuels, elles vont être restituées au continent noir.

Le 23 novembre dernier, sur sa propre demande, le président français Emmanuel Macron s’est vu remettre un rapport qui, sous la plume de l’historienne de l’art française Bénédicte Savoy et de l’écrivain et universitaire sénégalais Felwine Sarr, établissait l’inventaire des objets africains se trouvant actuellement dans des musées français et donnait des recommandations sur la manière dont ils doivent être restitués à leurs pays d’origine.

Le rapport et la mise en œuvre d’une démarche de restitution du patrimoine africain font écho à la promesse qu’Emmanuel Macron avait formulée un an en arrière à Ouagadougou au Burkina Faso, promesse par laquelle le président français s’engageait à faire retourner dans leurs pays d’origine un bon nombre d’objets d’art retenus dans des musées et des collections publiques français. « D’ici cinq ans, je veux que les conditions soient réunies pour un retour du patrimoine africain à l’Afrique », avait-il dit dans son discours à l’université de Ouagadougou.

Le blues africain de plusieurs musées français

Des dizaines de milliers d’objets africains (statues, masques et armes) se sont retrouvés dans l’Hexagone entre 1885 et 1960. Ces pièces sont venues enrichir les collections publiques françaises où elles sont restées si longtemps et sont à ce point devenues une partie importante et essentielle du fonds muséal qu’aujourd’hui leur éventuel départ pour l’Afrique noire menace de creuser un véritable trou noir dans le fonds en question. Un trou non seulement impossible à combler mais surtout très dangereux et hautement périlleux puisque menaçant d’« aspirer » la raison d’être même de ces musées dont l’originalité et l’unicité sont dues exclusivement à leurs riches collections africaines. C’est le cas du Quai Branly qui, détenteur de dizaines de milliers d’œuvres africaines, est le plus concerné de tous les musées français par l’initiative présidentielle sur le retour du patrimoine subsaharien en terre d’origine.

Devant la polémique qui monte, le discours d’Ouagadougou d’Emmanuel Macron se trouve tempéré et désormais on parle de « circulation » plutôt que de « restitution » des œuvres coloniales. Mais circulation ou restitution, le Bénin a déjà salué « le courage et la détermination » du président Macron et s’est réjoui de la décision toute récente de la France de lui retourner les 26 œuvres qu’il réclamait depuis des années.

Quand l’Egypte réclame aussi ses oeuvres- phares

Les pays, bénéficiaires très probables de la restitution- circulation entreprise par Macron, sont le Tchad (avec 9200 œuvres détenues à Paris) le Cameroun (7 800), le Madagascar (7 500) et, notamment, le Bénin dont les demandes pressantes ont sans doute été à la base de l’initiative présidentielle de restitution des œuvres africaines.

Mais les demandes de retour d’objets acquis d’une manière plus ou moins douteuse par des Européens n’émanent pas uniquement des pays subsahariens. L’Afrique du Nord commence à réclamer aussi ce qui lui appartient. Et quand la terre des pharaons exige des musées occidentaux la restitution d’objets- phares de son passé, cela devient vraiment grave ! En effet, en la personne du très énergique Zahi Hawass, secrétaire général du Conseil suprême des antiquités, l’Egypte demande le retour – ni plus, ni moins – du buste de Nefertiti (Neues Museum de Berlin), de la pierre de Rosette (British Museum) et de la statue de Ramsès II que détient le musée de Turin.

Une demande susceptible d’exacerber sensiblement le débat sur les limites de l’universel et de contribuer à introduire quelques précisions « nationales » dans la définition du ce qui est conçu comme patrimoine commun de l’humanité.

 

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