Platform Economy: « Sharewashing ou (r)évolution hybride »

12 mai 2020

Platform Economy: « Sharewashing ou (r)évolution hybride »

Par Véronique Poulet

Sharewashing ou (r)évolution hybride de notre modèle socio-organisationnel?

En Europe, l’économie de plateforme a représenté 28 milliards d’euros de transactions en 2016 et aux USA, (the) « On demande economy » représenterait 56 MM de dollars, 7% du PIB et emploierait 2,5% des travailleurs (Etude DARES, 2017)…

Comme le déclare Ian Hathaway « l’économie des plateformes est un phénomène avéré si l’on regarde au bon endroit. »

Si l’on en croit Anne-Marie Nicot (ANACT), les plateformessont « définies comme des services économiques exerçant une fonction d’intermédiaire (…) proposant des biens, des services ou des contenus à des clients qui sont produits, mis à disposition ou vendus par des contributeurs qui peuvent être des professionnels ou des particuliers ».

Tantôt sous-ensemble de l’économie collaborative tantôt plus larges, certains distinguent les « Plateformes numériques » (échange de contenus, tels que Facebook ou Google) de « l’économie collaborative « (illustrée en pratique par Uber, Airbnb ou encore Deliveroo). Outre l’opposition entre lucrativité et échange gracieux, les auteurs Bostman et Rogers proposent de  les classer en trois grandes catégories : les systèmes services/produits (basée sur la performance d’usage), les marchés de redistribution (Amazon…) et les solutions de style de vie collaboratif (« couchsurfing»).

Parfois associées à « une culture alternative visant le partage d’actifs, la gratuité et les relations interpersonnelles ou à sa forme capitalistique faisant régresser les droits des salariés guidées par la recherche de profit » (Etude DARES, 2017), les plateformes transforment profondément le travail et « disruptent « notre rapport à la propriété, nous faisant glisser vers une culture de l’usage.

C’est en effet dans un contexte qualifié « d’ubérisé » que ces nouveaux intermédiaires utilisent les nouvelles technologies « pour capturer une partie de la chaîne de valeur au détriment des intermédiaires traditionnels » (Le Petit Robert, 2017).

Que sont ces intermédiaires d’un nouveau genre ? Des entreprises traditionnelles, « allégées », « nœuds de contrats » (Théorie de l’Agence) ou des « organisations-marchés » (Snricek) réconciliant ENFIN « entreprise » et « marché » ?

Les plateformes font en effet parler d’elles en raison de la fulgurance de leur essor et de leur modèle d’affaire se situant en « limite » des catégorisations économiques et juridiques habituelles et traditionnelles. Ce phénomène semble également s’inscrire plus largement dans un « brouillage » ambiant en termes de frontières industrie/service, salariat/indépendant, travail rémunéré/bénévolat, temps de travail/personnel (A-M Nicot). La philosophe Gabrielle Halpern illustrera d’ailleurs ce propos par le fait que « (tout semble) placé sous le signe du composite, du contradictoire. En un mot, tout s’hybride ».

L’économie de plateforme semblant donc refléter des réalités bien différentes, rend toute démarche de classification assez complexe. Les études portant sur l’économie de la fonctionnalité restant encore rares, l’analyse de ce phénomène doit se nourrir de regards croisés entre sociologie, économie, droit et management.

 

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