Pour une ville plus vivable et plus durable

30 mai 2022

Pour une ville plus vivable et plus durable

Par Eugénie Rousak

Phénomène historique qui a indéniablement changé nos sociétés, les premières villes datent de près de 10 000 ans avant notre ère. Alors que les activités d’agriculture et d’élevage remplacent progressivement la chasse et la cueillette, le style de vie nomade perd son sens. Ainsi, les populations s’installent, aménageant leur environnement direct. Depuis, le principe de ville ne cesse d’évoluer, suivant les besoins de ses habitants. Si au début du XIXe siècle, les habitants du milieu urbain ne représentaient que 2 % de la population mondiale, les villes n’ont cessé de gagner en popularité. Selon une étude de l’ONU publiée en 2018, les zones urbaines s’élargiront à six milliards de personnes d’ici 2050, soit plus ou moins 70 % de la population mondiale. Il y a un siècle le rapport entre campagne et milieu urbain était inversé. L’élan de l’industrialisation et une inflation démographique importante ont donné le ton à l’agrandissement rapide des cités. Si à l’époque leur développement était fait d’une façon incontrôlée, voire chaotique, aujourd’hui l’aménagement urbain se doit d’être durable et réfléchi pour répondre aux défis des zones d’habitations et aux besoins de la population. Une ville ne peut plus être considérée de façon indépendante, mais doit être pensée en accord avec son environnement et les aspirations de l’ensemble de ses habitants, indépendamment de leur âge, statut ou métier.

Le nouveau visage des zones urbaines

Témoins de leur époque, les villes évoluent au fil des transformation de leurs activités, leurs organisations internes et leurs besoins. Par exemple, la transition démographique en Suisse change les priorités. Ainsi, avec plus de départs à la retraite que de nouveaux arrivants sur le marché du travail, les recettes fiscales vont diminuer, alors que les bouleversements sociaux, la nécessité de logements adaptés aux personnes âgées et l’intérêt pour les centres de soins vont marquer les tendances globales.

Les nouvelles façons de consommer, notamment poussées par la transition numérique et l’évolution technologique, conduisent vers une mutation structurelle à long-terme des flux de circulation et distribution des marchandises. Ainsi, les enseignes pourraient quitter l’hyper-centre, laissant la place au secteur des services, espaces culturels ou de détente ainsi que des zones vertes et piétonnes.

Aujourd’hui l’aménagement urbain se doit d’être durable et réfléchi

Finalement, les mutations sur le marché du travail, tant au niveau des délocalisations des productions des biens vers les zones rurales qu’une nouvelle définition du lieu de travail rythment la réorganisation des villes. Selon un sondage mené en mars 2021 par le cabinet de conseil Deloitte, 61% des interrogés souhaiteraient bénéficier du télétravail au moins la moitié du temps, alors qu’un retour au bureau à 100% n’est mentionné que par 12% des participants.

La pandémie de COVID-19 a certes accéléré le développement technologique, mais a surtout indéniablement marqué les mentalités. Une récente analyse du marché immobilier suisse menée par Crédit Suisse met en évidence les flux migratoires des grands centres vers les communes d’agglomération à proximité immédiate, notamment portés par des raisons économiques. Le prix d’un appartement neuf de quatre pièces à Vernier, Thônex ou Meyrin est de 30 à 33 % en dessous des prix dans la ville de Genève.

La possibilité de télétravail a ainsi ouvert la voie à l’élargissement du rayon de recherche du fait de la réduction du nombre de déplacements et a suscité de nouveaux besoins, comme un espace de bureau au domicile, devenu possible avec une économie de coûts.

Projets en cours

Cette mutation de tendances, combinée à l’anticipation des évolutions des besoins de demain, ajuste les plans directeurs et priorités en matière d’urbanisme des villes. Les projets repensent les utilisations des espaces existants et les objectifs des nouvelles constructions, privilégiant le respect de l’environnement. Les termes des maisons à énergie positive, éco-quartiers, immeubles autosatisfaisants, métropoles vertes ou encore végétalisation sont ainsi rentrés dans le vocabulaire des architectes.

Ainsi, la Ville de Genève a par exemple mis en place un plan stratégique de végétalisation (PSV 2030) à l’horizon de 2030 pour conjuguer le développement urbain avec une augmentation des zones de verdure. Ainsi les mesures proposées concernent près de 56 hectares sur les 1600 de la Cité, notamment dans zones très peuplées comme les Pâquis, Plainpalais ou encore la Jonction. Par exemple, avec le départ des Transports publics genevois (TPG) de leur dépôt historique à la Jonction, un réaménagement de la Pointe en un parc est actuellement en analyse. Ainsi, il s’agit de repenser les quelques 25 000 mètres carrés pour renforcer et améliorer les activités de baignade, de détente et de sports nautiques déjà existants, ainsi que de profiter du nouvel espace, notamment sous les anciennes halles, pour élargir le spectre des animations.

La conservation de la biodiversité et l’importance de la nature sont également deux thématiques mises en avant dans les constructions de nouvelles habitations, comme en témoigne le projet du Parc des Crêts à Troinex. Organisé en îlots d’habitation, il présente un ratio de 79 % de zones vertes par rapport à la totalité de la surface aménagée. Et même dans la zone urbaine, la tendance est de fondre les nouvelles constructions sans déranger ou visuellement alourdir le paysage existant. L’encrage est donc de mise. Par exemple, le tout récent Pavillon de la danse sur la très centrale place Sturm donne l’impression de flotter dans l’espace, s’intégrant parfaitement entre l’Église russe, les immeubles existants et l’espace aérien au-dessus de la rue Ferdinand Hodler. 

Genève se transforme pour s’adapter aux besoins d’une ville de demain

Si avec l’apparition de l’industrie automobile, les villes se sont transformées pour accueillir ces nouveaux utilisateurs des espaces, aujourd’hui la tendance se renverse avec de plus en plus d’initiatives pour piétonniser certains pôles urbains. Le plan directeur des chemins pour piétons (PDCP) de Genève met justement en avant l’encouragement de la promenade, la facilitation des mouvements et l’élimination des obstacles aux piétons, comme en témoigne la création de la voie verte, itinéraire destiné aux mobilités douces de 22 kilomètres.

Un autre projet de taille est l’aménagement de la zone autour de la gare Cornavin. Alors que l’épicentre ferroviaire sera repensé, les espaces à proximité immédiate vont conjointement faire peau neuve.  Dans dix ans le trafic motorisé sera complètement banni de cette zone. Cette nécessité découle de la hausse du nombre de voyageurs par jour, amené à doubler d’ici 2030, notamment suite à la création du Léman Express. En quelques minutes, il connecte ainsi le centre genevois aux zones d’agglomération, dont la gare de Lancy-Pont-Rouge. Actuellement en pleine transformation urbaine, le quartier de Praille Acacias Vernets (PAV) est l’un des plus grands projets de « ville dans la ville » sur une surface de 230 hectares. Ainsi, il accueillera des entreprises et habitants entre l’Aire et la Drize, remises à ciel ouvert.

A travers ces différents travaux d’envergure, Genève se transforme pour s’adapter aux besoins d’une ville de demain.

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