Rencontre avec KAN, phénomène artistique qui a mis le pointillisme sur un piédestal

9 juillet 2025

Rencontre avec KAN, phénomène artistique qui a mis le pointillisme sur un piédestal

Photo: JocondeDeMarseille_©Meta

On croise souvent ses toiles dans les belles adresses parisiennes ou genevoises. KAN est un artiste multiple à l’œuvre protéiforme. Chantre du pointillisme, il crée d’étonnantes fresques et tableaux mêlant graphisme et pixels. Son Street Art coloré d’une grande technicité et minutie, raconte le monde en jetant des passerelles entre les époques et leurs colères. Exposé chez Prazowski Gallery, KAN nous interroge comme il nous fascine. Entretien croisé pour Le Monde Economique pour comprendre (un peu mieux) le phénomène.

Par Sabah Kaddouri

Monde Economique: Comment se porte le marché du Street Art ? Où se situent les nouvelles dynamiques ?

Jérémy Prazowski : Le marché du Street Art est en plein essor, il est aujourd’hui à la croisée de l’art contemporain, de la culture populaire et de l’innovation numérique. Le Street Art est porté par une reconnaissance institutionnelle croissante, une expansion géographique vers de nouveaux territoires et une adaptation aux outils numériques. Il ne se limite plus à l’art mural illégal, mais s’intègre pleinement à l’économie de l’art globalisée.

© KAN

Monde Economique: Ce mode d’expression revendicatif a connu un pic dans les années 80. Quarante ans après, sommes-nous dans l’embourgeoisement ?

Jérémy Prazowski : Il y avait effectivement une forme d’expression plus revendicatrice dans les années 80 car le milieu n’avait pas encore rencontré les galeries je pense. Certains artistes de cette époque sont maintenant des artistes reconnus et, peut-être, qu’ils se sont un peu embourgeoisés. Mais n’est-ce pas simplement le fait de vieillir qui les pousse à prendre moins de risques ? Je ne sais pas trop…

Monde Economique: Une rencontre, une réflexion, un acte spontané, une actualité ? Comment naît une œuvre Kan ?

KAN : Les œuvres naissent de différentes causes. Une actualité peut me faire réagir de façon négative, et donc m’inspirer pour créer une œuvre de « Violence Urbaine » ou de façon positive, et donc me pousser à créer une œuvre plus poétique et inspirante. Une rencontre peut évidemment aussi me donner envie de peindre un portrait. Une visite de musée, une émulation artistique, un festival de musique sont autant de source d’inspiration.

Monde Economique: Votre commande la plus insolite ?

KAN : Un père de famille voulait que je tire le portrait de la famille en l’intégrant dans une de mes scènes d’émeutes. J’avoue que j’ai dû refuser…

Monde Economique: On dit que l’art est subjectif ; parfois il révèle l’insoupçonné. Comment expliquez-vous le succès de vos fresques émeutes « Urban violence » auprès d’une clientèle d’avocats parmi la plus nombreuse ?

KAN : Je me suis souvent posé la question. Difficile de savoir effectivement pourquoi cette clientèle spécifiquement. J’imagine que cela a un rapport avec leur façon de voir le monde, peut-être une manière de « parler » à leur propre clientèle. Ont-ils aussi l’impression d’être un peu des rebelles par procuration ?

Monde Economique: La pixellisation, le minutieux travail de point par point (dit de pointillisme), vous caractérisent. Pourquoi ce choix et quels messages ?

La_Joconde_de_Marseille_KanDMV_MauMA_©Meta

KAN : Je suis venu progressivement au pointillisme. Je viens du milieu Graffiti à une époque où il fallait respecter les codes pour parler à ses pairs. Après des années de pratique, j’ai petit à petit commencé à expérimenter d’autres façons d’exprimer mon art. Ayant grandi avec des ordinateurs sur lesquels pour dessiner – il fallait passer par le pixel – j’ai naturellement essayé d’intégrer le pixel dans mon art. D’expérimentations avec des pochoirs carrés au détournement d’éponges pour en faire des tampons, j’ai fait évoluer ma technique.

Monde Economique: Quelle part d’histoire personnelle injectez-vous dans votre art ? Qu’est-ce qui vous touche ?

KAN : J’essaie de mettre une grande part de mon histoire personnelle dans ma peinture, mais comme tout artiste, j’ai aussi une partie un peu plus fantasque qui me permet de pouvoir créer des œuvres un peu plus fictives par rapport à mon quotidien. L’actualité, le cinéma, mais aussi la culture en générale, me touche.

Monde Economique: La Suisse est une terre de collectionneurs. Quelle relation entretenez-vous avec ce pays ?

KAN : J’ai quelques œuvres qui sont chez des collectionneurs en Suisse. J’ai exposé à Genève plusieurs fois. Les gens que j’ai rencontrés sont adorables et très réceptifs à mon art.

TourParis13_portrait_by_TheMouarf ©

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