Santé publique : Hic et nunc. Par Arnaud Schaller

17 juin 2012

Santé publique : Hic et nunc. Par Arnaud Schaller

Au lendemain de l’échec cuisant de la réforme du système de santé publique – réseaux de soins –, il convient de provoquer le débat, de se pencher sérieusement sur le dossier de manière globale et surtout de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. En effet, les Suissesses et Suisses, aiguillés par des arguments simplistes et peu respectueux de la réalité, ont refusé la loi sur le « Managed Care ». En lieu et place de se lamenter et de vanter les bienfaits présumés de cette étape manquée, il convient d’user de l’adage « Hic et nunc ».

Hic et nunc, car après cette lutte acharnée, les problèmes auxquels notre système de santé est confronté sont toujours présents et semblent ne pas vouloir s’estomper par magie. Certains parlent déjà d’une solution extrémiste – la caisse étatique et unique –. D’autres préfèrent arborer un vocabulaire plus raisonnable en parlant d’un plan global qui permet au système de se moderniser et enfin incarner les fondements premiers qu’on lui a imaginés.

La première solution représente un danger pour la politique de santé publique puisqu’elle ne solutionne en aucun cas le problème principal, à savoir l’évolution des coûts de la santé. Cependant, il faut être honnête et admettre que les réformes semblent être confrontées depuis des années à des blocages partisans et idéologiques empêchant toute avancée importante.

Soyons réalistes, il convient d’accepter que le système de santé a besoin de vivre quelques réformes. Corollaire de l’évolution technologique, des changements de société, de l’accès aux soins et de notre rapport avec la maladie, les coûts de la santé représentent aujourd’hui une dépense de 64 milliards de francs suisses par année. Cela implique que l’effort financier demandé à la population par les primes et l’impôt ne cesse, lui aussi, de croître et atteint ou dépasse, pour une grande partie, la limite du supportable. Tous les acteurs s’accordent sur ce point.

Dès lors, il devient nécessaire et urgent de déterminer les objectifs visés par notre politique de santé. Voulons-nous vraiment l’un des systèmes de santé les plus performants au monde? Sommes-nous prêts à assumer les charges qui en découlent ? Est-il normal que les jeunes paient pour les plus âgés et que les riches paient pour les plus démunis ? Notre système est-il réellement solidaire ?

Pouvons-nous, dans un domaine tel que celui de la santé, renforcer la responsabilité individuelle ? Ne devons-nous pas davantage agir en amont par la prévention ? Devrions-nous libéraliser totalement le système de santé ou au contraire l’étatiser ? Envisageons-nous une réduction du catalogue de prestation de l’assurance de base ? Comment financer ce système à long terme ? Tant de questions, malheureusement souvent boudées en raison d’un manque de courage.

Ces questions de sociétés ont impérativement besoin de réponses afin de dessiner les contours d’un système moderne, efficient et comportant de bonnes incitations. Nietzsche disait : « Y a-t-il des épidémies de bonne santé ? », en attendant une réponse par la positive de Novartis, Roche ou encore de Merck Serono, nous sommes forcés d’emboîter le pas et d’ouvrir le débat avec tous les acteurs du domaine. Espérons que celui-ci soit nourri, et non pourri ! Hic et nunc.

Arnaud Schaller collabore avec Le Monde Economique en qualité de chroniqueur et expert sur les thématiques liées à la politique de santé.

 

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