Interview Karine Cabourg: La profession de Business Analyste est encore peu connue et souvent confondue avec celle de chef de projet

21 juin 2017

Interview Karine Cabourg: La profession de Business Analyste est encore peu connue et souvent confondue avec celle de chef de projet

Interview de Madame Karine Cabourg, présidente du chapitre suisse de l’International Institute of Business Analysis (IIBA).

Monde Economique : Aujourd’hui le métier de business analyste fait couler beaucoup d’encre. En quoi consiste-t-il ?

Karine Cabourg : La Business Analyse est née d’un simple constat, environ 60 à 80% des échecs en matière de gestion de projets sont dus à un mauvais recueil de besoins et à une mauvaise communication entre les parties prenantes. Au regard de ces chiffres, il apparait manifeste que la présence d’un professionnel servant de facilitateur, ou d’interface entre le « monde de la technique » et le « monde des affaires » se faisait cruellement sentir. Ce rôle est particulièrement important, car nous évoluons dans un contexte économique en perpétuelle mutation à cause des innovations technologiques et de l’entrée en vigueur de nouvelles normes réglementaires. Le Business Analyste sert ainsi la stratégie de l’entreprise et l’aide à conduire les changements qui lui permettront de créer davantage de valeur au quotidien. C’est un allié très précieux, pour le chef de projet dont la mission est de réaliser la solution puisque leurs deux fonctions sont complémentaires. Toutes les entreprises quels que soient leur secteur d’appartenance pourraient avoir besoin de faire appel à un BA un jour, soit pour faire évoluer avec succès leur système d’information soit pour les aider à négocier au mieux les grands changements opérationnels, organisationnels et réglementaires qui pourraient affecter leur métier. La profession de BA est encore peu connue et souvent confondue avec celle de chef de projet. Mais en ce moment, elle commence à se structurer et c’est l’objectif que s’est fixée l’association IIBA (International Institute of Business Analysis), promouvoir ce métier.

Monde Economique : L’IIBA, l’organisme que vous représentez en Suisse a pour vocation de former des business analystes. Quel cursus de formation un futur BA doit il suivre pour être reconnu par la profession ?

Karine Cabourg : Juste une précision, en tant qu’association à but non lucratif, nous ne pouvons pas former directement des BA, mais nous soutenons tous les organismes de formation reconnus en Suisse qui proposent des formations dans ce domaine. La mission première de notre association est de faire reconnaître et de promouvoir le métier de Business Analyste.

Du côté des Etats Unis et du Canada, là où est née cette discipline l’apport de la Business Analyse est tout autant reconnue que celui de la gestion de projet, jusqu’à salaire équivalent entre le BA et le Chef de projet. En Suisse et en Europe nous n’en sommes pas encore là. C’est pour cela que notre association IIBA Geneva organise diverses manifestations, comme notre congrès annuel, au cours desquelles elle explique aux entreprises tout le bénéfice qu’elles pourraient retirer de la présence d’un Business Analyste dans le cadre d’un projet. Parallèlement à cela, nous proposons des ateliers mensuels d’1h30 autour d’une technique ou d’une thématique particulière. Ces ateliers sont animés par des formateurs bénévoles issus de la communauté d’experts que nous animons. La mission de ces mentors est de partager leurs connaissances avec nos membres ou toutes les personnes qui nous sollicitent pour développer leur expertise en matière de business analyse. Nous proposons également des « Study Groups ». Il s’agit de séances d’auto-formation durant lesquelles les participants vont approfondir certains points du BABOK (Business Analysis Body of Knowledge), le manuel de référence de la Business Analyse. Ces séances d’auto-formation peuvent soit servir de prérequis pour passer l’une des certifications proposées par IIBA soit aider des novices à découvrir à leur rythme la discipline lors de soirées très conviviales et sympathiques. Il faut toutefois savoir que pour passer la certification CBAP® un prérequis de 35 heures de formation est exigé, ce dernier se réduit à 21 heures de formation pour la certification CCBA® ou le certificat ECBA™

Monde Economique : La fonction de BA relève d’une vision globale de l’entreprise. Est-il obligatoire de s’intéresser à d’autres disciplines pour l’exercer au mieux ?

Karine Cabourg : C’est généralement un métier que l’on pratique alors que l’on a déjà une certaine expérience professionnelle, soit dans son domaine d’activité soit dans l’informatique. Cependant ce métier nécessite aussi des compétences humaines c’est-à-dire un sens de l’observation, de la curiosité, et un sens relationnel développé pour mettre en confiance les différentes parties prenantes et comprendre les enjeux auxquels elles sont confrontées. Un Business Analyste doit avoir de grandes capacités d’écoute et de compréhensions ainsi que de très grandes qualités pédagogiques. Dans la mesure où il intervient comme facilitateur entre le métier et la technique, il doit pouvoir parler les deux langages et comprendre l’ensemble des parties prenantes afin de les amener à avoir une vision commune de la solution à atteindre, en tenant compte des objectifs stratégiques de l’entreprise. Le BA est un agent de liaison entre le métier et l’informatique. C’est celui qui comprend et analyse pour formuler des exigences et accompagner la transition vers des systèmes d’information toujours mieux adaptés. Il peut aussi avoir des aptitudes en matière de formation puisqu’il est souvent amené à accompagner ses clients ainsi que leur organisation dans les changements en lien avec la solution choisie.

Monde Economique: Selon certains spécialistes RH, les certifications IIBA seraient un talisman contre le chômage pour les salariés peu qualifiés. Etes-vous de cet avis?

Karine Cabourg : Un bon Business Analyste n’est pas forcément certifié. Toutefois lorsqu’il y a un changement de carrière, une certification est toujours un avantage et fait largement la différence dans la sélection des premiers dossiers. Deux certifications en Business Analyse de l’IIBA sont reconnues internationalement : le CBAP® : (Certified Business Analysis Professional) et le CCBA® (Certification of Capability in Business Analysis). Elles nécessitent plusieurs années d’expérience (7’500 heures en Business Analysis pour la première contre 3’750 heures pour la seconde) et sont d’un haut niveau. A ce jour, il existe seulement 73 certifiés CBAP® et 15 certifiés CCBA® sur le territoire helvétique. Un certifié en Suisse a donc un net avantage parmi les autres candidats sur un poste à pourvoir. Depuis Septembre 2017, l’IIBA a aussi mis en place un certificat : l’ECBA™ (Entry Certificate in Business Analysis) qui est une simple reconnaissance en Business Analyse et qui ne nécessite pas d’expérience, cela peut s’avérer très utile pour des salariés peu expérimentés et qui souhaitent toutefois se distinguer sur le marché de l’emploi. Avec un apprentissage associant théorie et pratique, il ne fait pas l’ombre d’un doute que la certification IIBA est un embryon de réponse à la problématique relevant de la valorisation des acquis professionnels.

https://geneva.iiba.org/

karine.cabourg@geneva.iiba.org

 

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