La cohésion helvétique – quelle importance pour les PME ?

3 novembre 2011

La cohésion helvétique – quelle importance pour les PME ?

Ce qui importe d’abord aux PME, ce sont les conditions-cadre, qui sont assez bonnes, en Suisse. Or, ces conditions-cadre reposent sur la cohésion du pays, et chez nous, où plusieurs langues et cultures se côtoient, il faut y être particulièrement attentif, car de nombreuses fractures se déclarent – ville/campagne, centres/périphéries, le contrat des générations pour les assurances sociales – dans un environnement économique qui a tendance à se dégrader. Dans un monde qui change, la stabilité intérieure est indispensable pour les entreprises. Et cohésion et stabilité sont les deux faces d’une même médaille.

D’où l’importance, voire l’urgence d’une communication intensifiée entre les deux grandes régions helvétiques, à tous les niveaux, car une tendance centrifuge s’est fait jour ces temps derniers. Les univers médiatiques du quotidien, les univers « people » des deux côtés de la Sarine, ont très peu d’interférences, et même les figures de l’économie connues des patrons et cadres de PME sont à quelques exceptions près différentes selon les régions.

Il n’est donc pas étonnant que la mobilité des cadres et employés de PME soit très restreinte au-delà de leur région. Essayez d’attirer un Alémanique vers Sion, ou un Romand vers Winterthur. C’est déjà difficile pour Lausanne ou Zurich. Ce n’est pas seulement une question de langue, ce n’est peut-être même pas tellement un problème de culture, c’est avant tout un problème de communication, celui de deux univers de plus en plus étrangers l’un à l’autre, au niveau du vécu quotidien.

Ce blocage comporte plusieurs inconvénients. D’abord celui d’aggraver la pénurie de main d’oeuvre qualifiée en Suisse, car la répartition des ressources humaines s’organiserait beaucoup mieux sans les barrières régionales. Pour y remédier, il faut des encouragements, voire une campagne de fond du côté des entreprises, de leurs organisations et des autorités cantonales et fédérales intéressées.

On pourrait ainsi profiter enfin de l’effort d’apprendre une autre langue nationale imposé aux jeunes, investissement qui coûte beaucoup et rapporte peu tant que la situation actuelle de cloisonnement dure. Si nous donnons un but et un impact réel à cet effort linguistique, les jeunes, voyant le profit qu’ils en tirent, s’y mettront avec bien plus d’application qu’aujourd’hui. Il est évident que les PME elles-mêmes ont tout intérêt à se rallier à ce mouvement d’ouverture vers les autres régions helvétiques et d’élargir ainsi leur champ d’action et leur marge de manoeuvre.

Il en résulterait un échange économique et culturel intensifié entre les régions helvétiques, échange bénéfique, car il permettrait de diminuer les déséquilibres non seulement entre les régions, mais aussi entre leurs centres et leurs périphéries.

Autre élément qui renforcerait la cohésion et diminuerait les coûts de la redistribution des biens. A l’époque des moyens de communication audiovisuels et des médias sociaux à la portée de tout le monde, le déblocage des régions pourrait, en effet, conduire à une meilleure répartition de la productivité, trop concentrée aujourd’hui sur les centres métropolitains, avec tous les problèmes qu’on sait, dont les infrastructures surchargées et les loyers en hausse.

Face à la crise financière actuelle, l’on nous prédit des temps difficiles. C’est donc bien le moment de mobiliser toutes nos ressources et d’oeuvrer pour la cohésion du pays. Ces deux objectifs, on les atteint par un seul et même effort, celui de dépasser les préjugés linguistiques et culturels dans les rapports avec les autres régions helvétiques.

C’est à cet effort que Le Forum PME/KMU est dédié. La vision de l’initiative, c’est une Suisse plus perméable à l’intérieur qu’aujourd’hui – dans l’économie, dans la formation et dans la culture. Son but pratique, c’est de créer une passerelle alémanico-romande permanente pour PME. C’est à cet effet que le site du forum vient d’être lancé, site que l’on développera au fur et à mesure de la demande du côté des entreprises.

Le Forum fonctionne selon le principe de subsidiarité, c’est une plateforme de rencontre et de communication au service de ceux qui désirent développer les affaires alémanico-romandes. On évite le plus possible les doublons d’avec des organisations existantes, avec qui l’on cherche la coopération. L’initiative mise sur l’interaction, c’est son leitmotif: l’interaction des régions, des entreprises, des organisations de l’économie, interaction des personnes intéressées enfin, en deçà et au-delà de la Sarine.

Dr. Peter Köppel, Consultant pour le magazine Le Monde Economique et Président du Conseil d’Administration de Köppel+Partner

 

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