Le titre : Fin des rapports de travail d’accord entre les parties : la liberté contractuelle n’est pas sans limites »

22 octobre 2015

Le titre : Fin des rapports de travail d’accord entre les parties : la liberté contractuelle n’est pas sans limites »

La résiliation d’un contrat de travail d’accord entre les parties est fréquente au sein des entreprises. Il s’agit de l’application du principe de la « liberté contractuelle », principe bien connu en droit Suisse. Cela étant, contrairement à ce que les termes « liberté contractuelle » pourraient laisser penser, les parties ne peuvent pas, même d’accord entre elles, prendre des engagements dont il résulterait pour l’une, l’autre ou les deux, des conséquences inadmissibles sur le plan juridique.

LE PRINCIPE

Selon la jurisprudence, les parties au contrat de travail peuvent décider, en tout temps et d’un commun accord, de mettre un terme au contrat de travail, pour autant qu’elles ne cherchent pas, par ce biais, à contourner une disposition impérative de la loi ou d’une convention collective. Il est précisé que ce type d’accord n’est pas soumis à une exigence de forme et peut donc être conclu par écrit, oralement, voire tacitement.

INTERPRETATION DE L’ACCORD ENTRE LES PARTIES

En cas de litige, pour déterminer s’il y a eu effectivement « accord entre les parties », le Juge doit tout d’abord rechercher la réelle et commune intention des parties. S’il n’y parvient pas ou s’il constate que l’une ou l’autre des parties n’a pas compris la volonté réelle manifestée par l’autre, il recherchera dans quel sens les parties pouvaient et devaient donner, selon les règles de la bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques (principe de la confiance). Dans ce cadre, les circonstances qui ont précédé et accompagné ces déclarations pourront éclairer l’interprétation du Juge.

LES LIMITES

L’accord entre les parties doit être interprété restrictivement, ce d’autant plus lorsqu’il n’est pas passé en la forme écrite. Dans ce dernier cas, le Tribunal fédéral exige que la volonté des parties de se départir du contrat puisse être établie sans équivoque. Et le Tribunal fédéral de préciser que « lorsque l’accord de résiliation par consentement mutuel est préparé par l’employeur, il faut que le travailleur ait pu bénéficier d’un délai de réflexion pour en apprécier correctement la portée et n’ait pas été pris de court au moment de la signature ». Par ailleurs, l’accord en question doit correspondre à un arrangement – exceptionnel – comportant des concessions réciproques de valeur sensiblement égale, pour autant qu’il s’agisse nettement d’un cas de transaction. Pour examiner l’ampleur des concessions réciproques, il faut se placer à la date de la résiliation d’accord entre les parties, sous réserve des événements imprévisibles pouvant survenir jusqu’à la fin du congé et imputables à aucune des parties.

CONSEQUENCE EN CAS DE NON RESPECT DES PRINCIPES CI-DESSUS

Si la volonté des parties de mettre fin aux rapports de travail d’un commun accord ne peut être établie, si des concessions réciproques font défaut ou encore si l’accord de résiliation est le fruit d’une volonté viciée, ledit accord n’est pas valable, a fortiori, nul. A titre d’exemple, dans une affaire récente, le Tribunal fédéral a confirmé la position du Tribunal cantonal valaisan, dans le sens « qu’est nul l’accord de résiliation signé par les parties, sur proposition de l’employeur, sans qu’aucun délai de réflexion ne soit accordé à l’employé, à un moment où celui-ci était soumis à de fortes pressions, compte tenu de la restructuration de la société, et se trouvait dans un état d’affaiblissement psychologique ».

CONCLUSION

On l’a vu, la liberté contractuelle, dans le contexte de la résiliation conventionnelle d’un contrat de travail, est soumise à d’importantes restrictions. Ainsi, la validité de ce type de résiliation n’est pas évidente, loin d’en faut. Dans ce contexte, on ne peut que conseiller aux parties d’être particulièrement claires quant à leurs volontés réciproques ainsi qu’à leurs droits et obligations et, au besoin, de consulter un professionnel du droit. En effet, en cas de nullité de la résiliation conventionnelle, outre les difficultés juridiques créées, les rapports privés entre les parties s’en trouveront forcément affectés, ce qu’il convient d’éviter.

Philippe Eigenheer

Partner

 

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