Macroéconomie – Cryptomonnaie ou crypto-mirage ?

22 novembre 2022

Macroéconomie – Cryptomonnaie ou crypto-mirage ?

Par Olivier de Berranger, CIO, La Financière de l’Echiquier

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Olivier de Berranger © LFDE

En tout juste 2 ans, la valeur totale des cryptomonnaies a connu une baisse de -70%, évaluée face au billet vert. Même si cela représente plus de 800 milliards de dollars, le dégonflement de cette bulle charriant son lot de scandales restera sans doute dans les annales.

Dernier évènement en date, la mise sous protection du « chapter 11 » de la loi américaine sur les faillites, prélude à celle de la seconde plateforme mondiale d’échange de cryptomonnaies : FTX. Depuis lors, les scandales touchant la société ne cessent de s’accumuler et les dommages collatéraux subis par le secteur s’empilent. Pourquoi une telle débâcle ?

Rappelons tout d’abord qu’une cryptomonnaie n’a de monnaie que le nom. L’usage du terme « crypto-actif » paraît plus pertinent. En effet, une cryptomonnaie ne répond pas à trois des fonctions essentielles d’une monnaie. Tout d’abord, ce n’est pas une réserve de valeur : sa volatilité, souvent stratosphérique, prouve le contraire. Elle n’est pas non plus un intermédiaire répandu pour les échanges : qui peut se prévaloir d’en avoir un usage exclusif pour l’ensemble de ses transactions quotidiennes ou financières ? Enfin, ce n’est pas une unité de compte : quel ménage ou quelle entreprise l’utilise pour sa comptabilité ? La définition qu’en donne l’Autorité française des Marchés Financiers (AMF) est limpide : « Un crypto-actif n’est pas une monnaie[1] ». De plus, ce n’est pas un actif générant des revenus comme le font les actifs traditionnels sous forme de dividendes, de coupons ou de loyers…

Ironie de l’histoire, le fondateur de la plateforme FTX, Samuel Bankman-Fried, n’a de banquier que le nom. Sa plateforme a bien fait l’objet d’un bank run – une ruée des déposants pour retirer leurs avoirs – qui a provoqué sa chute. Cependant, ce n’est pas une banque : elle n’est pas régulée par une autorité de tutelle, ni soumise à une autorité fiscale digne de ce nom, les Bahamas figurant sur la liste noire des paradis fiscaux de l’Union européenne. Et elle n’est pas non plus une société cotée soumise à des obligations de transparence.

Depuis cet évènement, les mauvaises nouvelles s’accumulent pour les acteurs du secteur : blocage des retraits pour certains, rumeur de faillite pour d’autres, pas un jour sans qu’un dommage collatéral ne surgisse.

En revanche, cet embrasement reste jusqu’ici circonscrit au monde des crypto-actifs. Les actifs traditionnels semblent relativement insensibles à ces soubresauts. Cela peut étonner, étant donnés les montants en jeu, mais cela paraît assez logique sachant que l’univers des crypto-actifs a dans son ADN le pouvoir de s’affranchir du carcan de la finance   ̎traditionnelle ̎, et d’en être à la marge.

Avec plus de 150 crypto-actifs totalisant chacun plus de 100 millions de dollars, la mer n’a peut-être pas encore fini de se retirer, et les nageurs sans maillots de bain pourraient bien se révéler nombreux dans le monde de la finance décentralisée.

[1] AMF : Qu’est-ce qu’une « cryptomonnaie » ?

Rédaction achevée le 21.11.2022

Disclaimers :

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