Valiant Bank AG : Le calvaire d’un entrepreneur broyé et trahi

11 juin 2025

Valiant Bank AG : Le calvaire d’un entrepreneur broyé et trahi

Par Thierry DIME – Directeur de la rédaction

L’histoire d’A. M. n’est pas simplement celle d’un entrepreneur floué. C’est celle d’un homme qui a cru en la solidité d’un système, en l’éthique d’un établissement bancaire, et qui s’est retrouvé broyé, réduit au silence, comme si sa parole ne valait plus rien. C’est le récit glaçant d’une relation de confiance trahie, d’un partenariat professionnel transformé en vendetta administrative, sans fondement ni justification valable.

Les faits

Tout commence par une cession d’entreprise, un acte banal dans la vie d’une société. R. Y., alors associé d’un restaurant, quitte la structure. Un contrat de cession est signé, entérinant la séparation. En dirigeant prudent, A. M. informe sa banque, la Valiant Bank AG, et demande la révocation des droits d’accès de son ancien partenaire. Une confirmation écrite lui est adressée. Un e-mail, daté du 28 mai 2024 à 10h59, le confirme : « J’ai enlevé les accès ebanking pour le restaurant à R. et supprimé les 2 cartes au nom de R. » La tranquillité d’esprit semble acquise. Elle ne durera pas. Mais ce n’était qu’un leurre. Quelques semaines plus tard, R. Y. reprend contact avec le même employé de la banque — un ami de longue date — et prétend que le contrat de cession aurait été annulé sur la base d’un e-mail envoyé au registre du commerce. Aucun document légal n’est transmis, aucune décision judiciaire ou administrative ne vient appuyer cette déclaration. Rien d’autre que ses mots. Et cela suffit.

C’est là que l’affaire bascule dans l’absurde. Sans même en avertir l’associé gérant A. M., qui a la signature individuelle et sans égard à l’assurance qui lui a été donnée en lien avec la suppression des accès de R. Y., la Valiant Bank AG réactive les accès bancaires de R. Y. Peu de temps après, le compte de l’entreprise est entièrement vidé par R. Y.. Comment ne pas s’indigner face à une telle légèreté, une telle négligence ? Pour justifier cet acte, la banque évoque un « contrôle de plausibilité », arguant que R. Y. aurait déclaré vouloir régler des rappels et des salaires. Mais aucune vérification supplémentaire n’a été effectuée, aucune précaution élémentaire prise, et surtout, A. M., l’associé gérant, n’a jamais été informé.

« C’est incompréhensible », s’indigne Me Arnaud Constantin, avocat d’A. M. Et comment lui donner tort ? Comment expliquer une telle attitude de la part d’une institution censée incarner la sécurité et la confiance ? Le pire est pourtant encore à venir. Au lieu d’assumer ses responsabilités ou de chercher une résolution amiable, la Valiant Bank AG choisit une posture brutale. Elle résilie non seulement le compte bancaire du restaurant, mais aussi l’ensemble des comptes personnels et professionnels qui touchent de près ou de loin A. M., et les trois autres sociétés ainsi que la fondation dans lesquelles il était impliqué, comme si elle voulait le rayer de la carte, le punir d’avoir été victime. Le compte bancaire de l’une des sociétés concernées a été maintenu après que la banque a obtenu la confirmation que A. M. n’en était plus l’associé. « Ce qui me manque dans ce dossier, ce sont les relations humaines. Pourquoi cet acharnement ? Pourquoi est-ce que l’employé de la banque a été contre les instructions claires données par le gérant avec signature individuelle ? Pourquoi est-ce que ce même employé, qui ne s’occupe que de la clientèle privée, s’est retrouvé impliqué dans les relations bancaires d’une PME ? » interroge Me Constantin. Une question qui, à ce jour, demeure sans réponse.

Imaginez un instant la douleur et l’incompréhension de cet entrepreneur. Non seulement il perd les fonds de son entreprise, qui a dû fermer pendant deux mois suite aux faits faute de liquidité pour payer les salaires, mais il voit aussi ses autres projets, ses espoirs, s’effondrer sous le poids d’une décision aussi arbitraire qu’injuste. Sa réputation, patiemment construite, se trouve soudainement entachée, livrée aux soupçons et aux rumeurs. Il a même dû démissionner d’une association qu’il avait contribué à fonder et qui n’a pas voulu continuer avec une personne dont les comptes bancaires sont résiliés immédiatement. Le dommage à la réputation est fait : comment un entrepreneur actif dans le domaine bancaire depuis vingt ans peut expliquer être rayé de la carte avec autant de virulence par une banque sans qu’on imagine qu’il a quelque chose à se reprocher ?

Face à cette faute grave de la banque, A. M. ne réclame pas vengeance, mais il est déterminé à obtenir justice. La Valiant Bank AG a botté en touche ses premiers contacts en vue de trouver une solution amiable au profit de mesures de rétorsion dirigées personnellement contre l’entrepreneur, ce qui a empiré son dommage et nécessité l’implication de l’ombudsman des banques, de la FINMA et des autorités pénales. Conscient de ne pas faire le poids face à Goliath, il demande des explications. Avec l’aide de son avocat, il sollicite notamment l’accès à son dossier, conformément aux articles 400 CO et 72 de la LSFin. La réponse de la banque est cinglante : sa demande est qualifiée de « querelleuse ». Valiant Bank AG refuse de transmettre les documents, prétendant qu’A. M.  dispose déjà de toutes les informations nécessaires. Ce qui est faux. « Je ne sais pas ce qui s’est exactement passé. Tout ce qu’on sait, c’est qu’il y a eu ce retrait, et que la banque ne donne pas plus d’informations », insiste Me Constantin. La transparence, visiblement, n’est plus une valeur cardinale.

Dans le cadre de cette enquête, la rédaction du Monde Économique a pris soin de contacter la Valiant Bank AG. Voici la réponse de Me Bernhard Berger, son avocat : « Merci de me donner l’occasion de commenter votre article. Valiant Bank AG ne peut pas commenter des cas individuels en raison du secret bancaire et des procédures en cours. Valiant Bank AG peut toutefois souligner quelques points généraux. Il est vrai que les banques sont soumises à des obligations strictes de diligence raisonnable, dont la mise en œuvre est souvent complexe. Cependant, grâce à la transparence et à la confiance mutuelles entre Valiant Bank AG et ses clients, cela ne pose généralement pas de problème. En cas de désaccord, la relation commerciale peut être résiliée par l’une ou l’autre des parties. Valiant évalue systématiquement chaque cas individuellement et recherche la meilleure solution possible pour toutes les parties concernées. »

Cette correspondance remonte au 15 mai dernier. Depuis cette date, Me Constantin nous indique qu’aucune avancée concrète n’a été enregistrée et que la banque ne manifeste aucun désir d’aboutir à une résolution.

Cette histoire ne raconte pas seulement les déboires d’un entrepreneur brisé par la machine bancaire. Elle révèle une dérive plus large. Trop souvent, les établissements bancaires prennent des décisions lourdes de conséquences sans en mesurer les impacts humains ni économiques. Dans un contexte où la stabilité du système repose aussi sur la confiance des PME, de tels agissements s’avèrent contre-productifs. Ils nourrissent la méfiance, fragilisent le tissu entrepreneurial et installent un climat délétère. Aujourd’hui, A. M. se bat pour sa dignité, pour sa survie. Son courage et sa détermination forcent le respect. Mais il ne devrait pas avoir à mener ce combat seul. Il est temps que les responsabilités soient établies et que justice soit rendue. Car derrière les chiffres et les transactions, il y a des désillusions et des rêves anéantis, et surtout une leçon cruelle : dans le monde de la finance, le cœur et l’humanité ne devraient jamais être relégués au second plan. La Valiant Bank AG a-t-elle encore un cœur qui bat pour nos entrepreneurs ? La suite dans un prochain article.

Note de la rédaction :

Les noms des personnes et certaines références ont été volontairement anonymisés afin de préserver les démarches en cours. 

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