FACEBOOK ENTRE LES CHIENS, LES CHATS ET LES SIRENES DU « GRAND COMPLOT »

10 mars 2019

FACEBOOK ENTRE LES CHIENS, LES CHATS ET LES SIRENES DU « GRAND COMPLOT »

Par Dessy Damianova

Il y a quinze ans, en 2004, année où l’Amérique a fait ses adieux à l’une de ses figures marquantes, celui qu’on considérait comme le « chuteur » du Mur de Berlin et le « tombeur » du bloc de l’Est – l’ancien président Ronald Reagan – un parfait inconnu était sur le point de prendre à son tour sa place parmi les hommes emblématiques de sa génération. Une génération qui, quant à elle, n’allait connaître ni de murs, ni de limites, mais qui, par le biais du « net », allait tisser des liens et des réseaux entiers.

Justement, depuis sa chambre d’étudiant à Harvard, Mark Zuckerberg lançait, en 2004, le premier réseau dit social. Dans les années suivantes, les comptes de son Facebook se multipliaient d’une manière plus qu’explosive pour s’élever aujourd’hui, quinze ans plus tard, au nombre vertigineux de 2,3 milliards. La valeur en bourse de la société est estimée à 500 milliards de dollars. Mark Zuckerberg, quant à lui, est l’un des hommes les plus riches de la planète : le plus jeune parmi eux, aussi. N’ayant même pas atteint ses 35 ans, l’imaginatif rouquin est à la tête d’une fortune s’élevant à 62 milliards de dollars.

Un modèle économique controversé.

Service éminemment gratuit, Facebook compte sur la publicité ciblée pour générer des bénéfices. Les données personnelles accumulées sur la plate-forme rendent ce ciblage possible et facilitent la promotion « sur mesure » de divers produits et services. La publicité ciblée assure les 98% du chiffre d’affaires de Facebook la moitié duquel est réalisée en Amérique du Nord.

Le modèle économique du célèbre réseau est pourtant fortement critiqué et cela dès ses débuts – soit bien avant que n’éclatent les scandales liés à la divulgation d’information privée. Le seul fait de mettre des données à disposition de tierces personnes inspirait la méfiance. Le scandale avec le Cambridge Analytica en 2018 n’a fait que révéler le caractère ambigu et fragile d’un système dont le succès est basé sur le stockage de données privées. Cambridge Analytica, société britannique de publication stratégique, avait reçu accès au contenu de 87 millions de profils personnels sur Facebook et, forte de cette information, avait pu intervenir dans les élections présidentielles américaines. Le scandale a sensiblement secoué l’entreprise de Mark Zuckerberg qui, sommé à s’expliquer sur la fuite de données, a dû comparaître tant devant le Sénat américain que devant le Parlement européen. La fuite de données en faveur de Cambridge Analytica a valu au célèbre rouquin la fuite de presque 13 milliards de dollars de sa fortune personnelle que l’effondrement spectaculaire de l’action de Facebook en bourse a sérieusement écornée. De 75 milliards avant les révélations, elle est tombée à 62 milliards après l’éclatement du scandale.

Et encore des chiffres… 

Toujours en est-il que, quinze ans après sa création et malgré tout ce qu’on a pu dire sur le risque d’abus, un quart de l’humanité est et demeure « sur » Facebook. Avec 947 millions d’utilisateurs, la fréquentation du fameux réseau est particulièrement sensible en Asie (surtout en Inde et en Indonésie), ce continent étant en même temps celui où Facebook est bloqué ou limité. En effet, la plate-forme est complètement proscrite dans la Corée du Nord et strictement limitée en République de Chine.

Quinze ans après son lancement, Facebook fait partie inséparable de notre quotidien de gens « branchés » et « connectés ». Des photos de bons petits plats aux conjectures du « Grand complot », des images de chats mignons à des appels à la révolte et des gentils échanges entre amis aux dernières lubies des haters,: beaucoup de choses, aujourd’hui, passent par Facebook. Dès lors, toute tentative de musellement, à l’avenir ou au présent, sera perçue comme une agression, soupçonnée (inévitablement !) d’être lancée par les deep haters de quelque deep project (de conspiration, s’entend !) 

Et oui, les adolescents n’aiment point qu’on les restreigne ou même surveille ; et tant mieux qu’en l’occurrence, ce n’est point (encore) le cas ! Du haut de ses 15 ans, ado tour à tour sage et passablement rebelle, Facebook défend sa liberté… Sinon, pour lui, à l’heure qu’il est, tout va plutôt bien. Il continue sa traversée joyeuse  – arche de Noé allègre et gaie sur les eaux troubles et grises de notre monde, avec, à bord, 2 milliards d’humains et… un nombre impressionnant de chats et chiens. 

 

Recommandé pour vous