L’EURO : LA DEUXIEME DEVISE LA PLUS IMPORTANTE AU MONDE FÊTE SES DEUX DECADES D’EXISTENCE

14 février 2019

L’EURO : LA DEUXIEME DEVISE LA PLUS IMPORTANTE AU MONDE  FÊTE SES DEUX DECADES D’EXISTENCE

Par Dessy Damianova

Mis en circulation en 2002 mais officiellement adopté le 1 janvier 1999, l’euro fête actuellement ses vingt ans d’existence. Vingt ans d’essors et de chutes, de grandeur et décadence. Vingt ans pendant lesquels, monnaie unique, il a été le symbole ultime d’une Union Européenne élargie, avec tout ce que cela supposait d’autorité sur la scène internationale en même temps que de contradictions internes et d’inégalité de l’évolution financière. Aujourd’hui, l’euro est utilisé dans 19 des 28 membres de l’Union, il est en circulation également dans d’autres 60 autres pays qui d’une manière ou d’une autre ont lié leur devise nationale avec la monnaie unique européenne. Cela fait de l’euro la deuxième devise la plus importante au monde après le dollar américain.

Adopté dix ans après la chute du Mur de Berlin, l’euro était en effet conçu pour être l’attribut- phare de ce que, dès l’entrée en vigueur du Traité de Maastricht, allait devenir une Union Européenne. Née en 1993 comme héritière de l’ancienne CEE, l’Union était en même temps quelque chose de sensiblement nouveau. Du fait de son élargissement à l’Est, elle voyait, en ce début des années 90, son élément politique se renforcer, l’amenant à être désormais une véritable puissance internationale.

Une grande puissance, l’UE l’a incontestablement été pendant les vingt dernières années. C’était pourtant une puissance passablement secouée ; rien ne s’est vraiment déroulé de la manière dont on l’avait imaginé en cette fin du 20-ème siècle que marquaient des chutes de murs et de frontières, qu’imprégnait un optimisme triomphant et où l’Hymne de l’Europe (l’Ode de la joie de Beethoven) donnait encore des palpitants frissons. Dès le début du nouveau siècle, le contexte politique et économique a radicalement changé et dans ce nouveau cadre, rien ne fut épargné à la jeune puissance mondiale, ni d’ailleurs à sa monnaie unique, à son symbole – l’euro.

La première rude épreuve vint en 2008. Ironie du sort : juste avant l’automne où éclatait la crise, l’euro atteignait sa plus haute valeur et s’échangeait à 1,59 USD. Sa chute vertigineuse à 1,27 USD en novembre 2008 et les angoisses que cela a entraînées ont révélé les limites des principes qui étaient censés régir l’euro, leur inefficacité voire dangerosité en période de crise. Préconisée par le Traité de Maastricht, acte fondateur de la monnaie unique, la non- intervention de la Banque Centrale Européenne dans des moments critiques fut notamment perçue comme presque indécente sur fond de détresse économique et de ce risque de naufrage qu’encouraient certains pays. Dès lors, la « non- intervention » fut transgressée et la BCE a apporté une aide financière considérable à des pays où la crise avait sévi avec le plus d’acuité.

Aux difficultés rencontrées par la Grèce est liée la deuxième et sans doute la plus grande, à ce jour, épreuve de l’existence de la monnaie unique. A peine la crise financière apaisée, la Grèce était déclarée en défaut de paiement, ses problèmes risquant de devenir ceux de toute la Zone euro. Le choc des deux tendances, l’orthodoxie fondatrice de Maastricht d’une part et de l’autre, le désir de transgresser les règles au nom d’une solidarité entre pays membres, est devenue à ce moment plus âpre que jamais. Elle continue aujourd’hui avec des discussions régulièrement butant sur le problème de la mutualisation des dettes et de coopération entre Etats de la Zone euro. Les pays du Nord, en tête avec l’Allemagne, s’y opposent toujours de manière très ferme.

Vingt ans plus tard, les avis sur la monnaie unique sont partagés. Pourtant, entre le triomphalisme des grands responsables européens et le franc négativisme des euro- sceptiques, dans leur grande majorité (74%), les citoyens des pays membres témoignent, d’une confiance stable (certes – pas forcément enthousiaste) en la monnaie unique.

Il y a aussi des attitudes plus nuancées, elles aussi révélatrices de certains états d’esprit. Comme par exemple cette sorte de blues que nourrissent une partie des Allemands à l’égard de l’ancien Deutsche mark, et cela malgré le fait que leur pays soit le plus grand bénéficiaire de la monnaie unique. En effet, ils sont encore nombreux outre- Rhin à s’avouer nostalgiques des anciens billets de banque, surtout celui, très symbolique, à l’effigie de Clara Schumann. La force du mark liée à la féminité et à la grâce de la célèbre pianiste valaient d’ailleurs au billet de 100 DM, dans les décennies septante et quatre-vingts, le surnom de « reine de l’Europe ».

Dès lors, la nostalgie du mark ne se présente-t-elle pas aujourd’hui comme une réaction à la nouvelle « reine d’Europe », à cette Angela Merkel qui, grande- prêtresse du culte de l’euro (et de l’argent en général), ne cesse pas de parler de rendement, austérité et performance économique ?

 

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